Avignon pendant le Festival; Avignon (Provence) during the theater festival
Une rue animée pendant le festival à Avignon (Vaucluse): a busy street during the theater festival in Avignon (Provence)
Quatre ans après ma dernière venue au Festival, j’avais décidé de consacrer cinq jours au Off cette année, au cours des derniers jours de ce Off qui a duré plus longtemps que le In, out dès le 26. Les spectacles donnés quotidiennement devaient approcher du millier et j’ai dû me limiter à une vingtaine. Mon choix est allé vers les pièces qui faisaient honneur à la langue française… en cette période de recul de la syntaxe et de l’avancée des tournures et des mots anglais. J’ai renoncé aux spectacles de variété et de music-hall. Honneur à ceux qui jouent en virtuoses avec les mots de la langue.
A l’Espace Roseau Teinturiers, François Mougenot faisait des doublages du français au « néo français » utilisé par le beau monde aujourd’hui, d’une grande drôlerie dans « Ma grammaire fait du vélo ». Excellent.
Au théâtre des Corps Saints, le clown Clov (Eric de Dadelsen) interprétait « Le Tournesol », de ses textes et de ceux du Québécois Sol (Marc Favreau), en contractant et distordant le langage avec virtuosité. Le regretté Sol avait donné il y a bien longtemps au Off « Je persiffle et je singe » que les amateurs n’ont pas oublié. *Dans un tout autre registre du seul en scène, Nicolas Lambert faisait une critique accablante du complexe militaro-industriel français en évoquant notamment l’attentat de Karachi de 2002 dans « l’A-Démocratie Rouge- le Maniement des Larmes », une des trois pièces du triptyque Bleu- Blanc-Rouge (je n’ai pas pu voir les autres) au Théâtre Gilgamesh. Ses imitations de Sarko, Balladur et de JJ Bourdin sur RMC étaient particulièrement drôles. On n’avait plus très envie d’être français à la sortie…
Dans le même lieu sept jeunes acteurs exprimaient leur difficulté de vivre dans « Et dans le trou de mon coeur, le monde entier » de Stanislas Cotton. J’avoue n’avoir jamais entendu parler de cet auteur auparavant. Un vrai talent.
Au théâtre de l’Ange, j’ai aimé le « Huis Clos » de JP Sartre interprété par la compagnie « Les éclats de Lettre ». Garcin et ses deux cdétenues y donnaient une interprétation saisissante. Nous n’étions qu’une vingtaine de spectateurs. Quel dommage ! Eric-Emmanuel Schmitt est l’un des plus appréciés auteurs de théâtre francophone de notre temps. «Le Chien » m’a épaté par la qualité de la langue, l’originalité de l’histoire en forme de polar et le talent des deux acteurs. Le Roseau Théâtre avait fait le plein.
Au théâtre des Corps Saints, j’ai découvert un autre auteur talentueux, Jean Pétrement (je ne sors pas assez souvent de ma ferme), grâce à « Proudhon modèle Courbet » dans laquelle il joue le rôle de Proudhon.
Au théâtre des Barriques, il fallait réserver pour aller voir « Combat » de Denis Randet. Sur une scène exigüe, sept acteurs énergiques faisaient revivre la rédaction du quotidien « Combat » au moment de la Libération de Paris, dans laquelle Albert Camus était éditorialiste. Un exploit de jouer tant de situations complexes avec du matériel encombrant sur un mouchoir de poche. Tous ces spectacles sont à aller voir absolument s’ils sont donnés à moins de 100 kms de chez vous. Consultez internet.
Il y a des perles moins brillantes que ces spectacles de qualité. Au stand des billets du théâtre des Barriques était affiché « Tous acteurs de notre sécurité pendant le Off » dans un format rectangulaire de 60×40 environ. On pouvait y lire « l’ouverture de votre sac vous sera demandé ». Manquait le E à « demandé » car ouverture est féminin. Personne n’avait repéré la faute apparemment. J’ai fait la remarque aux jeunes femmes du stand. L’une d’entre elles a rétorqué « C’est pas nous, c’est la Préfecture ». Cette perle orthographique prouve qu’à la Préfecture un ignorant a été chargé de rédiger l’affiche et que personne n’a pris la peine de contrôler. Défenseurs de la langue française debout !
Je suis aussi défenseur de la langue d’Òc et là… calme plat. Rien en provençal dans la provençale ville d’Avignon. On pouvait lors de mon dernier passage en 2013 entendre du provençal au Palais du Roure… Il est en travaux.
André Abbe