Albert Fernand Séverin Roche naît en 1895 à Réauville dans la Drôme. Il est le benjamin des trois fils d’une famille nombreuse de modestes cultivateurs, Séverin Roche et Louise Savel.
Première Guerre mondiale
Lors de la mobilisation générale de 1914, le conseil de révision le refuse à cause de sa fragile constitution ce qui enchante son père dont les deux aînés sont enrôlés, il lui reste ainsi un fils pour les travaux de la ferme.
Cependant Albert ne l’entend pas de cette oreille, Il veut se battre comme ses frères et une nuit il se sauve.
Arrivé au camp d’instruction, il fait des pieds et des mains pour être admis et on finit par l’affecter au 30 e Bataillon de Chasseurs. Cependant tout ne va pas pour le mieux, il est mal noté, son caractère impossible fait de lui le mal-aimé de la troupe, si bien qu’il s’enfuit mais il est vite rattrapé et mis en prison pour désertion.
En juillet 1915, il est affecté au 27e Bataillon de Chasseurs alpins dans l’Aisne, bataillon d’élite que les Allemands ont surnommé « les diables bleus ».
de nombreux faits d’armes
Un nid de mitrailleuses empêchant les Français de monter à l’assaut, il se porte volontaire pour aller le détruire en rampant jusqu’aux tranchées adverses, là il atteint le tuyau d’aération de l’abri allemand, y introduit une poignée de grenades et la position est neutralisée.
L’explosion tue plusieurs soldats. Les survivants croyant être attaqués par un bataillon entier se rendent, les Français récupèrent les mitrailleuses et font huit prisonniers.
Ce coup d’éclat lui vaut la promotion de Chasseur de première classe.
Suite à un pilonnage d’artillerie ennemie, il se retrouve seul survivant de sa tranchée. Il positionne alors les fusils de ses camarades avec lesquels il tire en courant d’un à l’autre faisant croire à l’ennemi que son bataillon résiste encore, ce qui permet au commandement français d’envoyer des renforts et de maintenir la position.
Il est un jour fait prisonnier avec son lieutenant grièvement blessé. Lors d’un interrogatoire destiné à lui extorquer des renseignements sur les positions françaises, il parvient à désarmer et tuer son interrogateur et à s’enfuir en ramenant le lieutenant blessé sur son dos.
Lors de la bataille du Chemin des Dames, son capitaine grièvement blessé gît entre les lignes. Il rampe alors sous le feu des mitrailleuses pour le rejoindre, parvient à le ramener et le confie aux brancardiers. Épuisé par cet effort, il s’endort dans un trou d’obus. Réveillé par une patrouille qui le prend pour un déserteur il est jugé par le tribunal militaire pour « Abandon de poste sous le feu » et condamné à être fusillé dans les 24 heures.
Nous sommes alors en pleine période de ce que l’on a appelé les mutineries de 1917 et l’état-major veut faire un exemple. Malgré ses dénégations et sans témoin pouvant corroborer ses dires, il est envoyé au cachot en attendant la sentence. Il écrit à ses parents « Dans une heure je serai fusillé, mais je vous assure que je suis innocent. ».
Alors qu’il est attaché au poteau devant le peloton d’exécution qui s’apprête à tirer, une estafette surgit, le capitaine a repris conscience après plusieurs jours de coma et apporte son témoignage le disculpant.
Il est promu chevalier de la légion d’honneur en septembre 1918 avec la citation suivante :
« Chasseur dont la bravoure est légendaire au bataillon. Fait preuve, dans les circonstances les plus difficiles d’un mépris absolu du danger ; conserve un calme absolu aux moments les plus critiques, donne à ses camarades l’exemple de l’entrain, exalte leur courage, est pour ses chefs un auxiliaire précieux. Pendant les opérations du 31 août 1918, a réussi comme agent de liaison à transmettre à toutes les sections de sa compagnie les ordres du commandant, n’hésitant devant aucun danger, triomphant des difficultés de toutes sortes, montrant un rare esprit de décision, une conscience au-dessus de tout éloge. Médaillé militaire pour faits de guerre (sept citations). »
Le général de Maud’huy lui remet la croix de la Légion d’Honneur et il est convié à la table du général Mangin.
L’après-guerre, le temps des honneurs
Il aura été blessé neuf fois, fait 1 180 prisonniers à lui tout seul mais la fin du conflit, il est toujours soldat de première classe, si bien que le général Foch ayant découvert ses états de service s’est écrié avec stupeur : « Il a fait tout cela, et il n’a pas le moindre galon de laine ! ».
Le 27 novembre 1918, il le présente au balcon de l’Hôtel de Ville de Strasbourg en déclarant: « Alsaciens, je vous présente votre libérateur Albert Roche. C’est le premier soldat de France ! ».
Le 11 novembre 1920, il porte le cercueil du Soldat Inconnu lors de la cérémonie à l’Arc de Triomphe.
En 1925 il sera de la délégation française conduite à Londres par le général Gouraud aux obsèques du Field Marshall Lord French et convié à la table du roi Georges V.
retour à l’anonymat et Fin de vie
Il retombe ensuite dans l’anonymat chez lui à Valréas dans le Vaucluse où il devient cantonnier et se marie en 1921
C’est en avril 1939 qu’il est renversé par une voiture, transporté à l’hôpital d’Avignon, il décède le 14 avril âgé de 44 ans.
Edouard Daladier né à Carpentras et député du Vaucluse demande que les honneurs militaires lui soient rendus et transmet un don anonyme de 20.000 francs à sa veuve (soit environ 10.000 euros de 2020).
La municipalité de Réauville fait ériger une stèle à sa mémoire devant sa maison natale en 1971.
En juin 2018, La Poste émet un timbre à la mémoire d’Albert roche.
décorations
Officier de la Légion d’honneur (décret du 30 juin 1937)
Médaille militaire (25 octobre 1917)
Croix de guerre 1914-1918, palme de bronze (quatre citations à l’ordre de l’armée et huit étoiles)
Insigne des blessés militaires (neuf blessures)
Médaille commémorative de la guerre 1914-1918 (1920)
Médaille interalliée de la Victoire (1922)
Croix du combattant (1930)
Croix du combattant volontaire 1914-1918 (1935)
Claude Boyer