La caisse de cauvin
L’histoire de Cauvin et de sa caisse m’avait été racontée par mon beau-frère Charles.
Dans ce quartier situé à la sortie de Vidauban sur la commune des Arcs (Var), traversé par l’ex RN7, ce bandit braquait les diligences et leurs passagers de façon originale: il disposait des mannequins de part et d’autre de la route, à moitié planqués, armés de fusils en bois, puis arrêtait les voyageurs en se plantant arme à la main au milieu de la voie. Le cocher et les voyageurs se rendaient, impressionnés par le nombre de voleurs et Cauvin pouvait tranquillement les dépouiller. La caisse en question servait à ranger les mannequins et leurs accessoires.
Personne d’autre ne m’a parlé de cette histoire de Cauvin et elle semble oubliée dans la région.
En revanche, j’ai trouvé dans les mémoires du regretté Jean-Claude Carrière, l’histoire du bandit Pomarède qui a fini sur l’échafaud en 1843 à Pézenas.
Cette histoire de braquage tout bénéfice pour l’ingénieux braqueur n’est pas pure invention, ça a eu payé aurait dit Fernand Raynaud.
Jean- Claude Carrière, fils de vigneron languedocien, écrivain, auteur de théâtre et scénariste d’un immense talent, n’a pas été inspiré par l’histoire de Pomarède.
Il aurait pu en tirer un scénario dans le style de celui du film “le Retour de Martin Guerre”.
André Abbe
Voici l’histoire de Jean de pomarèdes
Tous les Bitterois ont entendu parler du ’’trou de Pomarèdes’’ situé sur la route de Bessan d’où part un souterrain qui arrive à chapelle de la Badone datant du 16ème siècle.
Inutile de la chercher l’entrée, il est obstrué depuis longtemps.
Jean de Pomarèdes naît à Caux dans l’Hérault à proximité de Pézenas le 7 avril 1801. Il est l’unique fils d’un couple de cultivateurs aisés.
Il a tout pour réussir mais c’est un enfant dissipé et agressif qui se taille vite une réputation de mauvais garçon.
Il a 24 ans quand son père meurt et son héritage représente une valeur de 10.000 Francs or, une fortune à l’époque. Il se compose d’une maison, de vignes et de champs d’oliviers.
En 1830, il épouse Jeanne Rouyre.
Dans un premier temps il fait des affaires avec son beau-frère Félix. Il investit son argent dans l’achat d’un important stock d’eau de vie de vin. Mais par malchance, l’arrivée d’alcool de betteraves du Nord de la France trois fois moins cher, lui fait perdre ses investissements. Il est rapidement mis en difficulté financière mais ce n’est cependant pas la ruine car Pomarèdes possède toujours sa propriété de Caux et le vin qu’il produit lui rapporte un peu mais il faut qu’il envisage son train de vie à la baisse et c’est là qu’il commence ses larcins.
Un jour, son berger vient le voir pour lui réclamer son salaire, il le reçoit alité, grippé et le paye sans rechigner mais alors qu’il rentre chez lui le berger est menacé et dévalisé par un homme masqué à cheval.
Il lui semble toutefois avoir reconnu son patron et pour en être sûr, il retourne à Caux et retrouve Pomarèdes au coin du feu mimant la maladie.
‘’ Tu vois bien que j’ai de la fièvre et que je ne peux sortir avec un froid pareil ! »
Arrive Noël et tandis qu’il est à la messe de minuit, sa maison brûle mais peu de temps auparavant, il avait fort opportunément souscrit une forte assurance.
Fort du succès de cette escroquerie il s’engage dans une spirale infernale qui va le faire basculer dans la délinquance, de travailleur le jour, il deviendra voleur la nuit et il met au point une stratégie. D’une part, il ne sévit que les nuits sans lune ou nuageuses et d’autre part, il opère avec deux chevaux pour brouiller les pistes.
Un qu’il monte pour commettre son larcin et l’autre qui l’attend un peu plus loin. Il va ainsi détrousser des voyageurs et des commerçants qui reviennent du marché de Béziers.
En décembre 1837 sur la route de Capestang il attaque de deux marchands de bestiaux, en avril 1839, sur la route de Paulhan, il attaque une diligence qui lui rapporte un butin 1000 Fancs or, en janvier 1840, il dérobe 3000 Francs or puis c’est le percepteur des impôts porteur de 2 sacs de louis d’or et cette année là il commet deux assassinats.
Il multiplie ainsi ses agressions en toute impunité grâce à son stratagème consistant à utiliser deux montures.
Son forfait accompli il galope vers le souterrain, abandonne son cheval qui rentre seul à l’écurie, s’engouffre dans le fameux ‘’trou’’, rejoint la chapelle de la Badone, là il enfourche son deuxième cheval qui l’attend et rentre chez lui. Mais un jour, pris en chasse par des témoins il décide d’enfouir son butin dans un champ de blé mais un enfant l’aperçoit et donne l’alerte. Pomarèdes intercepté et conduit par trois gendarmes à la prison de Béziers.
Le procès a lieu le 25 Novembre 1842 et dure 13 jours en présence de 250 plaignants. Il est accusé de vols, d’incendie, d’escroquerie à l’assurance, d’assassinats et bien d’autres motifs et se conclut par sa condamnation à mort.
Le 18 février 1843 il monte à la guillotine sous les huées de la foule en demandant pardon à Jeanne sa femme. Il s’allonge sur la planche et à 11h15, sa tête tombe dans le panier de son, emportant avec lui le secret du lieu où il avait caché son trésor qui n’a jamais été retrouvé.
Ultime punition, le curé refuse de l’enterrer dans le cimetière. Son corps est mis en terre dans une fosse devant l’entrée du cimetière de Pézenas ainsi les passants foulent sa tombe dans un piétinement d’humiliation perpétuelle.
Claude Boyer