Village de Brovès (Var) avant son abandon; Brovès (Provence) village before desertion
Le village de Brovès a été évacué en 1972 avant l’implantation du camp militaire de Canjuers
Brovès village has been emptied before its take-over by the Canjuers military camp in 1972
Il y a 45 ans, j’allais peindre sur les routes du centre Var et du haut Var, « Non à Canjuers » ou « Non au Camp de Canjuers ». J’écrivais sur la route comme j’aurais écrit sur un cahier mais les copains m’avaient demandé d’écrire à l’envers « Canjuers à Non » pour que les automobilistes puissent lire à l’endroit… Je n’ai jamais été contrariant, j’ai commencé par la fin.
Hélas, les foules varoises ne nous ont pas suivis et le camp on l’a bel et bien eu. Les gens de Canjuers iraient se faire voir ailleurs, le canton de Comps ne serait plus accessible que par une seule route, dans l’indifférence quasi générale.
Il faut dire que l’ancienne SFIO du président du Conseil Général Soldani et la Parti Communiste, opposants à la droite au pouvoir, n’ont pas protesté. Seuls le PSU et les Occitanistes ont lutté avec leurs modestes moyens… Edouard Soldadi a même facilité la venue de l’armée en expliquant qu’elle allait apporter des emplois.
Ces emplois on les attend toujours. Canjuers, 36000 hectares, le plus grand camp militaire d’Europe, a été installé après le départ des habitants du village de Brovès, des hameaux et des fermes du plateau. Un drame pour ces familles d’éleveurs. Il s’est peu parlé des suicides que ces expulsions ont provoqués.
Les paysans du Larzac quand il fut question d’installer un camp chez eux sont venus s’informer chez nous et ont su ce qui les attendait s’ils ne se mobilisaient pas Ce camp qui accueillait autrefois 100 000 brebis mères a la forme d’une énorme saucisse qui coupe le Nord du Var du reste du département.
L’armée française s’y entraîne et y accueille parfois des troupes de pays amis peu respectueux des droits de l’homme. Les hélicoptères font la navette entre la baie de Fréjus et le plateau de Canjuers. S’ils n’apportent pas d’emplois, ils apportent au moins des décibels.
Les bergers installés sur sa périphérie ont pu s’entendre avec les militaires et faire paître leurs troupeaux sur certaines parties du camp. Hélas une meute de loups a trouvé cet espace peu habité à sa convenance. Des bois pour se cacher, des moutons pour se nourrir, la vie est belle. Les loups descendent jusqu’à Fayence et Saint Paul. Il n’y aura bientôt que la mer pour les arrêter.
André Abbe
En vidéo : “Actualités de 1970 – Visite du futur camp militaire de Canjuers” (ORTF, 15/12/1970)
A lire également : “Connaissez-vous le village fantôme de Brovès?” (Var Matin, 02/06/2016)
Tag “Bergers en péril” en 1985
“Shephard in danger” in 1985